Dans un jardin qu’on dirait éternel

Tatsushi Ōmori | Japon – 2020 – 1h40 | A voir sur UniversCiné ou Canal VOD

L’art de la cérémonie du thé comme leçon de vie, c’est ainsi qu’on peut résumer le premier film du réalisateur Tatsushi Ōmori sorti en France (son quatrième en réalité). Ne serait-il que ça, ce serait déjà beaucoup, tant il y a de profondeur dans ce qui s’apparente plus à une forme de méditation qu’à une dégustation dans un salon de thé occidental…  Mais le film est aussi une réflexion sensorielle sur le temps qui passe et le sort des femmes japonaises. Au début des années 1990, deux cousines désœuvrées – l’une sage, l’autre plus délurée – débutent leur initiation aux gestes ancestraux de la préparation du thé auprès de Mme Takeda, maitre en cérémonie du thé, interprétée par la grande Kirin Kiki, dont c’est le dernier rôle.

Initiation est le terme qui convient. L’apprentissage dure des années, et n’est jamais vraiment achevé.Le film suit les saisons et les années qui se succèdent dans la maison de l’exigeante professeure, avec une délicatesse infinie. Tout est suggérée par les éclairages, la photographie, superbe, et la capture de sons feutrés, presque des odeurs. Et puis il y a les séquences de la « vraie » vie, ou plutôt de la banalité du quotidien. On suit le parcours des deux cousines, leurs joies et leurs peines. On découvre aussi avec elles comment l’art de la cérémonie de thé fait évoluer leurs personnalités… On reprochera peut-être au film quelques scènes superflues, et surtout une musique un peu mièvre. La grâce l’emporte de très loin.

 

 

Le Juge et l’assassin

Bertrand Tavernier | France – 1976 – 1h50 | A voir sur Netflix, Arte Boutique, UniversCiné ou Canal VOD

Décédé le 25 mars, Bertrand Tavernier laisse les cinéphiles, les Lyonnais et sans doute aussi les Caladois, qui ont pu le rencontrer plusieurs fois au cinéma Les 400 Coups, orphelins. Sa haute silhouette singulière, sa voix inimitable et sa verve pour défendre ses idées et raconter le cinéma vont forcément manquer. Le Juge et l’assassin est l’un de ses plus grands films.

1893, Sud-Est de la France. Joseph Bouvier, officier réformé par l’armée, tente de tuer sa fiancée, Louise, puis de se suicider. Quelques mois plus tard, sorti de l’asile, il vagabonde sur les routes escarpées de l’Ardèche, assassinant et violant une vingtaine de femmes et adolescents. Un ambitieux juge de province, Emile Rousseau, va le traquer, puis tenter de gagner sa confiance pour obtenir sa condamnation.

Inspiré d’un fait divers qui défraye la chronique dans une France dans le contexte du début de l’affaire Dreyfus, le quatrième long-métrage de Tavernier entre dans la catégorie « film historique », mais il s’agit tout autant d’un drame psychologique, d’un brulot politique et même d’un western, avec sa chasse à l’homme dans les grands espaces ardéchois que le réalisateur filme en format large, à la manière des cinéastes américains qu’il aime tant. C’est aussi une confrontation entre deux géants : Philippe Noiret, le juge, et l’étonnant Michel Galabru, l’assassin, à qui l’on a jamais plus donné un rôle aussi puissant et passionnant.

Pin It on Pinterest

Share This